La loi Pacte fait de la propriété intellectuelle un enjeu majeur des entreprises. A ce titre, l’INPI* doit adapter le système de la propriété intellectuelle aux nouvelles pratiques, renforcer la robustesse des titres, et répondre aux besoins de toutes les entreprises, notamment ceux des TPE-PME pour permettre de faire de la propriété intellectuelle un levier de développement. Échange avec Sylvie Guinard, Présidente de l’entreprise Thimonnier et Présidente du Conseil d’administration de l’INPI depuis novembre 2019.

Quelles sont les raisons qui vous ont encouragées à accepter ce mandat ?

guinardQuand le Directeur général de l’INPI est venu me proposer la Présidence de l’INPI, j’ai beaucoup réfléchi. Je suis très sollicitée en tant que femme et je dois faire des choix. Les mandats que j’accepte doivent avoir une signification pour moi. Je ne m’engage jamais pour l’image ou le côté honorifique. Je dois pouvoir apporter une vraie valeur ajoutée et enrichir le sujet.

Ce mandat à l’INPI est totalement en phase avec mes valeurs, mon engagement et surtout l’ADN de mon entreprise, qui s’appuie sur ses deux pieds, l’innovation et l’international. Et en tant que dirigeante, je peux personnifier le discours et les arguments sur le sujet, il a forcément plus de portée pour les chefs d’entreprise. A partir de là, il fallait juste que je sache comment m’organiser pour intégrer ce mandat supplémentaire à mon agenda !

 

Quels sont les enjeux de la propriété intellectuelle ?

Aujourd’hui, on le sait tous, l’industrie n’est plus dans un champ franco-français. La révolution technologique et numérique est mondiale. L’entreprise doit désormais innover de façon structurée et responsable avec une ouverture sur le monde devenue incontournable, ce qui change la donne de la propriété intellectuelle. Mais les risques liés à l’absence de propriété intellectuelle sont peu perçus. Ils sont traités malheureusement bien souvent au même niveau que la sécurité informatique, c’est-à-dire mal ! Le dirigeant ne s’en préoccupe qu’au moment où le risque est survenu ! Pourtant les innovations constituent un véritable actif dans un bilan, au même titre que le matériel. Les talents, la compétence, le savoir et le savoir-faire relèvent de la propriété intellectuelle. C’est un sujet que les TPE-PME s’accaparent très peu…et il faut que cela change. L’innovation doit devenir pour eux une richesse et un levier de développement.

Quel est le rôle de l’INPI ?

La première mission de l’INPI est d’enregistrer les marques, les dessins et les modèles et de délivrer les brevets d’invention. L’INPI est également chargé d’accompagner les entreprises, en particulier les PME et les start-ups, moins bien armées, dans leurs démarches de protection de leur propriété intellectuelle. Pour cela, l’Institut dispose d’un réseau présent en France et à l’international. Il joue également un rôle fondamental dans la mise à disposition des données sur les entreprises et la propriété industrielle ou encore dans la lutte contre la contrefaçon. L’ambition de l’INPI est de pousser les entreprises à se poser la question de la protection des innovations non seulement pour limiter les risques mais aussi en faire un levier de développement.

En quoi, la loi PACTE a-t-elle eu un impact sur les orientations de l’INPI ?

Et bien avec la loi PACTE, son rôle va plus loin ! Les mesures inscrites dans cette loi ont pour principal objectif de favoriser la croissance des entreprises françaises, notamment par l’innovation et l’export. Pour l’INPI, il s’agit de renforcer la sécurité juridique des titres de propriété industrielle et d’en faciliter l’accès. Par exemple, il est dorénavant possible de protéger des marques sonores ou de mouvement. Et l’INPI a d’ores et déjà ouvert ces fonctionnalités, en ligne, à ses déposants. En 2020, d’autres nouveaux services seront proposés comme la demande provisoire de brevet et, surtout, l’INPI prendra en compte l’activité inventive pour la délivrance des brevets, ce qui les rendra plus robustes en cas de litige, notamment à l’international.

Pouvez-vous nous parler des dernières actions de l’INPI ?

L’INPI travaille sans cesse à une meilleure protection des innovations. Par exemple, en décembre dernier, l’Institut a ouvert son « Portail data ». Il s’agit du premier moteur de recherche sur les entreprises. Il permet de consulter facilement les informations sur 5,9 millions d’entreprises françaises. Et en 2019, l’INPI a créé une offre de service dédiée aux start-ups, répondant ainsi aux besoins spécifiques de très petites structures qui sont en hyper-croissance. Il intervient dans de nombreux incubateurs comme Station F à Paris, mais également en régions comme auprès du H7, lieu totem de la French Tech à Lyon ou auprès des entrepreneurs créateurs de la Fondation pour l’Université de Lyon. Rappelons aussi que l’INPI est l’organisme responsable des homologations des indications géographiques. Neuf ont été délivrées à ce jour.

Quels conseils donneriez-vous à une TPE–PME sur le sujet de la protection intellectuelle ?

Surtout, ne pas hésiter à consulter l’INPI, c’est facile et c’est gratuit. Les entreprises peuvent participer à une réunion découverte, s’inscrire à des webinaires en ligne ou bien faire venir un expert de l’INPI chez elles. Ces premiers contacts lui permettront de savoir si elle doit approfondir sa démarche sur la propriété intellectuelle. La propriété industrielle n’est pas un frein, c’est un levier qui donne à l’entreprise une avance technologique. Elle doit être anticipée et permet de rentabiliser les coûts de R&D.

En comprenant les tenants et les aboutissants de la propriété intellectuelle, l’entreprise pourra aller au-delà de ses idées reçues et décider en fonction de la réalité de son marché.

 

*Institut national de la propriété industrielle

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