Après 5 ans de mandat en tant que président et parce que le pilotage d’UIMM LYON FRANCE est avant tout un travail d’équipe avec les élus et les permanents, je veux vous présenter les industriels qui m’accompagnent au sein de notre Bureau, sur les chantiers menés.Je vous propose d’aller, au fil des mois, à leur rencontre, pour découvrir leur approche des enjeux de l’industrie, partager des expériences, mieux nous connaître et nous rapprocher.Pour ce premier article, c’est David GAUTHERON qui dirige la SEGM que nous avons choisi de mettre en lumière.Bruno VOLAND
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David GAUTHERON, SEGM
Un entrepreneur en quête de la combinaison idéale entre le développement pérenne de son entreprise, ses valeurs humaines et sa conscience « RSE ».
David Gautheron dirige la SEGM, entreprise familiale de mécanique de précision presque centenaire. En 2008, lorsqu’il en devient le gérant, il bâtit un plan d’actions stratégiques pour la développer. En 2009, il installe ses nouveaux locaux à Trévoux, dans une zone industrielle. Depuis, il ne cesse de faire grandir son entreprise en investissant chaque année dans de nouvelles machines et en constituant, autour de lui, une solide équipe de 12 collaborateurs aujourd’hui. L’entreprise familiale a changé d’échelle avec un chiffre d’affaires multiplié par plus 4 passant de 514 K€ en 2009 à 2,21 M€ en 2022.Cette remarquable évolution s’est faite dans un souci constant du respect des enjeux sociaux et environnementaux et de valeurs fortes. Dans le même esprit, souhaitant partager son expérience, David a intégré les instances de l’UIMM Lyon France, où il est très actif, notamment au sein du Bureau.
RENCONTRE DE DAVID GAUTHERON !
Comment s’est passé la reprise de SEGM qui a traversé 4 générations de dirigeants ?
Quelle a été votre stratégie ?
Au départ, je ne voulais pas reprendre la TPE familiale. Je sortais des Arts et Métiers, je rêvais de grands groupes, de carrière, de capital, etc. J’ai passé 5 ans au sein de sociétés américaines, avant de rejoindre mon père en 2005. Je suis arrivé avec des méthodes différentes et la volonté de moderniser l’entreprise. C’était un challenge !
J’ai tout de suite compris qu’il fallait investir et notamment déménager les locaux peu accessibles. Nous avons choisi Trévoux où une zone industrielle se construisait. Lorsqu’en 2008, j’ai pris la gérance, mon diagnostic montrait une ultra dépendance au secteur de la chimie. J’ai choisi d’orienter rapidement l’entreprise vers d’autres secteurs pour assurer sa pérennité. Aujourd’hui, nous fabriquons des pièces pour des secteurs d’activité très variés, la chimie, le nucléaire, l’agroalimentaire, les laboratoires… Mais aussi pour des clients qui font de la machine spéciale, pompes, vérins etc. Parallèlement, j’ai développé une vraie structure « administrative » pour mieux gérer l’entreprise.
Quelle a été votre ligne directrice en termes d’investissement ?
J’ai commencé à m’équiper au moyen de la dette bancaire. Le développement constant du chiffre d’affaires et des exercices bénéficiaires ont permis de toujours investir au service de la croissance de l’entreprise. Je n’ai jamais distribué plus de 50% de résultat en dividende !
Mon père investissait environ tous les 3 à 5 ans dans une machine. Aujourd’hui, c’est une, parfois deux par an ! Plus de capacité de production pour plus de clients…et inversement pour l’investissement.
Comment allez-vous poursuivre votre croissance ?
SEGM a toujours eu un haut niveau d’exigence de qualité et l’entreprise vient de passer à l’ISO. Beaucoup de nos clients, dans le nucléaire notamment, ont de plus en plus de contraintes. Cette qualité va nous ouvrir des portes. Nous ne vendons plus seulement l’usinage mais une prestation complète avec des pièces usinées, un dossier qualité, etc.
Mais comme notre bâtiment de production est plein, notre marge de développement est faible. On va digérer nos derniers lourds investissements (500 K€ en 2022) avant de rebâtir un nouveau plan stratégique. Je pourrais trouver des investisseurs, mais je veux garder ma structure familiale et ne pas être aux mains des financiers. J’ai plutôt des velléités de croissance externe, mais seulement le jour où mon équipe de production sera bien stabilisée.
Après le développement pour le développement, non ! Il faut que cela ait du sens !
« Si je travaille avec SEGM depuis 10 ans, c’est pour la qualité de leurs produits provenant d’une démarche volontariste. J’en veux pour preuve l’analyse en amont des dossiers de consultation où les points durs sont identifiés et remontés au client, avant même l’établissement de l’offre. C’est ensuite la bonne conformité des pièces livrées
Aymeric Herrmann/ FRAMATOME / Responsable Technique
Vous qualifiez votre management de management humain, qu’est-ce que cela veut dire pour vous ?
Il me tient à cœur que les gens se sentent bien au travail avec deux conséquences. La première, c’est que j’aime que les gens soient heureux, et la deuxième, c’est que je suis persuadé qu’un salarié épanoui s’implique davantage dans son travail.
Cet épanouissement et l’implication passent notamment par le sens. Chez SEGM, le collaborateur a le plan de la pièce, la matière brute et… la satisfaction de fabriquer la pièce de A jusqu’à Z. Parfois, il a même un double défi, à la fois technique et financier. Cette pièce-là, va-t-on arriver à la fabriquer et à quels coûts ? Il y de l’adrénaline et du sens. Ç’est hyper important pour moi qu’on sache ce qu’on fabrique et où cela va.
Ensuite toutes les décisions sont prises en commun accord avec Sébastien Perronnier, notre responsable de production et associé. Sur les projets d’investissement, les personnes concernées sont bien sûr impliquées en amont. J’aime bien faire participer les gens à la vie de l’entreprise. Parfois la demande du client et ma vision de la chose ne correspondent pas à celle du terrain. Mais nous en discutons toujours. Les projets se bâtissent avec les équipes, en fonction des compétences complémentaires ou manquantes.
La formation interne est également une de mes priorités. Les anciens et les plus expérimentés aident et forment en permanence les plus jeunes, tant en compétences qu’en évolution de la personne. Sur une nouvelle machine, la formation est bien sur externalisée.
« Il y a une très bonne cohésion d’équipe où tout le monde se sent impliqué et va dans le même sens. David est très exigeant, mais c’est ce qui crée la cohésion du groupe, un peu comme un capitaine de rugby. Les équipes aiment ça, car il y a une direction claire et précise, tout est noté et marqué ; on sait exactement où l’on va.
Sébastien Perronnier/ Responsable de production / chargé d’affaires SEGM
Et puis un management humain, c’est aussi sortir des sentiers battus, c’est ça ?
J’ai la chance d’être à mon compte et je peux diriger la boite à mon image et appliquer ce qui me semble bien. En 2022, notre responsable de production voulait sensibiliser le personnel aux questions environnementales. Il m’a proposé d’installer des ruches et d’utiliser les CPF pour former le personnel à l’apiculture. C’était un investissement RH qu’on pouvait se permettre. Aujourd’hui, mille fois remboursé par le plaisir et la dynamique insufflés au sein de l’équipe.
En quoi les pratiques de la RSE sont-elles importantes pour vous ? et quelles sont les actions concrètes que vous avez mis en œuvre ?
LA RSE est une volonté affichée de l’entreprise et une constante depuis quelques années. J’aime me dire qu’on ne fait pas n’importe quoi, notamment pour nos enfants Mais, il n’est pas toujours facile de trouver des solutions efficaces et peu coûteuses. UIMM LYON m’a beaucoup aidé sur ce volet.
SEGM veille à ne pas trop avoir d’empreinte environnementale : bâtiments isolés, flux gérés par automate, tri et recyclage des déchets, notamment des résidus de matière d’usinage. Pour le confort de l’atelier, nous avons investi 70 K€ dans un système de refroidissement adiabatique pour une température constante de 25°. Une méthode peu énergivore de rafraîchissement d’air basée sur l’évaporation de l’eau et qui contribue au bien-être de l’équipe.
Côté investissement machines, nous avons d’abord des critères technico-économiques. La plupart de nos machines viennent d’Asie ! En revanche, c’est un critère sur le choix de nos fournisseurs qui sont en majorité locaux. C’est mieux pour le côté pratico-pratique de proximité et pour limiter les distances polluantes. Pour moi la RSE, c’est d’abord et souvent du pragmatisme !
« Le fait que SEGM soit à proximité favorise nos relations. La réactivité s’en trouve améliorée et l’empreinte carbone est faible par rapport à la concurrence. Leur démarche RSE est un critère supplémentaire de choix. Travailler avec une entreprise qui partage les mêmes valeurs que les nôtres influe bien évidemment sur nos choix finaux. Quelle fierté de travailler avec une entreprise française !
Christophe Le Corre/ SOLVAY /technicien fiabilité méthode
Et en RSE aussi, vous aimez innover ?
J’ai longtemps cherché à compenser le fait que nous soyons basés à la campagne et peu accessibles en transports en commun. J’ai décidé de mettre en place une flotte automobile 100 % électrique pour les collaborateurs. Une voiture de fonction et 4 pour l’équipe de l’atelier. SEGM finance la location et assure la charge gratuite sur le parking. L’assurance est prise en charge par les utilisateurs. Cette formule ne me semble pas courante dans les ateliers de mécanique !
« Quand j’ai voulu assurer ma voiture de société, l’assureur m’a dit : « Mais c’est qui, votre patron, c’est top ce qu’il fait ! ». Tout le monde ne peut pas dire ça, c’est assez exceptionnel. Et quand je dis à quelqu’un que j’ai une voiture du boulot, il me dit : « tu es amené à faire des déplacements ? ». Non, je travaille dans un atelier !
Pierre-Baptiste Campant/ Fraiseur
L’industrie souffre d’un manque d’attractivité et les recrutements sont difficiles. Comment abordez-vous cet enjeu ?
On ne résoudra pas les problèmes à court terme. Les professeurs et les parents ne connaissent pas nos métiers, les enfants non plus ! C’est de la communication sur le temps long. Je vais parfois à la rencontre des conseillers d’orientation pour leur présenter nos métiers. Je les invite à visiter notre atelier. Je ne cherche pas à les attirer, mais simplement à faire connaitre. Pour les intéresser, je donne des exemples concrets d’utilisation de pièces mécaniques. Voitures, Iphone, etc.
L’industrie est partout mais les gens ne le savent pas. Je rêve d’un MasterMécano à l’image de MasterChef. Montrer un mécano qui usine, fabrique une œuvre d’art à partir de l’acier, de l’inox ou autre, voire une belle soudure, etc. Que les gens découvrent à la télé toute la beauté et la variété des métiers de l’industrie.
« Les jeunes doivent s’arrêter de se faire une image de l’industrie de l’époque de leurs grands-pères. C’est n’est plus du tout ça. Les conditions de travail ne sont plus les mêmes. Il y aura toujours du travail dans l’industrie, que ce n’est pas payé au SMIC et qu’il y a des évolutions très importantes possibles.
Déborah Maréchal/ Technicienne qualité
Pourquoi avoir choisi de vous engager au sein des instances d’UIMM Lyon ?
Là encore, il y a un héritage familial. Mon père y était très actif. L’UIMM m’apporte énormément, comme à tous les petits patrons d’entreprise que nous sommes, pour un montant d’adhésion assez modeste. Nous avons un soutien, des services juridiques et d’information, etc. Tout cela a un coût, donc au-delà de nos cotisations, il me parait normal que les chefs d’entreprises donnent de leur temps. J’y vois aussi un rassemblement de chefs d’entreprises de toutes dimensions. Nous discutons parfois de problématiques similaires et c’est hyper enrichissant. Apporter de mon temps, c’est un partage d’expériences.
SEGM EN QUELQUES CHIFFRES
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2,21 M€ de CA 2022
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12 collaborateurs
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2,4 M€ Investis dans l’outil de production depuis 2010
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1400 m² Surface des locaux
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25 000 € Salaire brut annuel