Cette rentrée économique, sociale et au fond politique se caractérise par un agenda aussi dense qu’incertain. Ce paradoxe apparent traduit en réalité le moment critique que notre pays traverse. Les crises successives de nature différente attisent les tensions et les peurs. Elles exacerbent nos difficultés structurelles et mettent en péril les efforts déployés ces dernières années pour y remédier. Face à ce constat alarmant, poursuivre le cap de la réindustrialisation est indispensable. Trouver collectivement les marges de manœuvre pour y parvenir, à commencer par une solution urgente à la crise énergétique, n’en est pas moins complexe. Elle requiert une intense mobilisation à tous les niveaux, à laquelle l’UIMM prend au quotidien toute sa part.

La hausse exponentielle des prix de l’énergie, dont chacun mesure l’ampleur affolante au gré de la réception de devis de renouvellement des contrats de fourniture d’énergie, revêt un caractère singulier. Contrairement aux crises précédentes, elle n’affecte que l’Europe. Aussi cette crise asymétrique fragilise-t-elle directement les secteurs consommateurs d’énergie en Europe, à l’instar de l’industrie. Pire encore, elle fait peser une grave menace singulièrement en France ; pour deux raisons essentiellement : la crise intervient alors que notre compétitivité est toujours insuffisante par rapport à nos partenaires européens, et celle-ci s’inscrit au moment même où l’atout comparatif que nous avions grâce au nucléaire, est – temporairement – moindre.

Cette combinaison produit déjà des signaux inquiétants : pour la première fois depuis mai 2020, la production industrielle a enregistré en septembre un net recul. Un accord européen entre les États membres – en particulier avec un cap acceptable du prix du gaz qui pèse aussi sur le prix de l’électricité – n’est donc pas seulement urgent. Il est vital pour notre tissu industriel.

C’est dans ce contexte grave que s’est ouvert l’examen du projet de loi de finances pour 2023. Ce traditionnel exercice de traduction budgétaire d’une ambition politique doit désormais composer avec la nouvelle donne à l’Assemblée nationale. Or, il doit impérativement concrétiser la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), fusse-t-elle en deux temps. Cet impôt de production – nous ne cesserons de le rappeler – est profondément injuste : alors que l’industrie ne représente que 12,4 % du PIB, elle acquitte 24 % de CVAE !

Pour résoudre durablement cette injustice fiscale, nous devons sans relâche poursuivre notre travail de conviction auprès des élus. Un travail qui d’ailleurs dépasse largement les strictes problématiques fiscales et doit embrasser la vision cohérente du modèle social et industriel que nous portons.

A cet égard, l’agenda social national particulièrement chargé nous offre l’opportunité d’en faire la démonstration. Réforme de l’assurance chômage mais aussi réforme des retraites, partage de la valeur, sans oublier réforme du lycée professionnel, l’UIMM, par son positionnement stratégique au carrefour de l’expertise sociale et de l’expérience des territoires, sera au rendez-vous avec des propositions concrètes.

Nous les avions longuement travaillées notamment dans le cadre des dernières échéances électorales, et nous continuerons à les affiner au fil de nos échanges. Elles ont vocation à adresser les défis cruciaux pour le retour durable d’une industrie d’excellence, forte et moderne, dont les crises successives ne cessent de montrer l’impérieuse nécessité.

Nous continuerons donc faire valoir notre volonté de refonder notre modèle social pour qu’il soit plus efficient et que son financement soit compatible avec l’exigence indispensable de compétitivité dans une économie mondialement ouverte.

Nous continuerons à proposer des axes d’amélioration efficaces de la performance de notre système éducatif et de formation pour être à la hauteur de la bataille internationale des compétences.

Enfin, nous veillerons à œuvrer pour faciliter les mutations du travail afin de préserver l’emploi et répondre aux attentes des futures générations.

Car, au fond, les décisions – ou leur absence – dans les prochains jours à l’échelle européenne et au niveau national, auront un impact fondamental sur l’avenir de ces dernières. Le préparer en innovant, en développant les compétences a toujours été notre moteur, en dépit des difficultés, parfois majeures, rencontrées.

Forts de nos convictions, de notre expérience et de notre résilience face aux précédentes crises, nous devons rester collectivement mobilisés ; attentifs à chacun d’entre nous au sein de la chaine de valeur, attentifs entre filières ; et résolument engagés ensemble pour poursuivre le cap du développement de l’industrie !

Eric Trappier
Président de l’UIMM La Fabrique de l’Avenir